Qui se plaint de la météo ces derniers jours aurait dû entendre ces mots ce matin : « chez les Kanak, la pluie, c’est totem ! ». Ces mots sont ceux de Richard Poido, le conseiller aux affaires politiques et coutumières du Haussariat, prononcés lors de son discours coutumier devant une assemblée de représentants du Pacifique insulaire. En effet, ce matin, à la Communauté du Pacifique, s’ouvraient des conférences de trois jours organisées par l’IRD sur les grands fonds marins.

Alors que la question des fonds marins devient de plus en plus centrale dans les débats sur l’avenir de nos océans, ces trois journées s’inscrivent dans une initiative plus vaste avec la création d’une plateforme régionale d’échanges dédiée à ce sujet. Pas besoin d’enfiler votre scaphandre pour plonger dans ces trois jours, la rédac’ vous explique tout… 

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Cérémonie coutumière pluvieuse, cérémonie coutumière heureuse ! © NeOcean

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Vers un horizon de convergence

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© Fondation de la Mer

Si vous êtes un lecteur assidu de NeOcean, vous êtes sans doute conscient que les grands fonds marins sont devenus un sujet de préoccupation croissante pour la communauté scientifique et les décideurs politiques, en particulier dans la région du Pacifique. Alors que les mers et les océans représentent 71% de la surface terrestre, 88% de ces étendues sont plus profondes que 1000 mètres. Pourtant, ces abysses demeurent largement inexplorés et nos connaissances à leur égard demeurent limitées… 

Dans cette optique, la communauté internationale s’est saisit peu à peu de cet enjeu. Emmanuel Macron a déclaré 2024 comme « l’année de la mer », avec, en ligne d’horizon, la conférence des Nations Unies sur l’Océan, à Nice en juin 2025. Par conséquent, le Secrétariat d’État à la Mer a confié à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) la réalisation d’une expertise scientifique collective portant sur les enjeux de connaissance et de gouvernance des grands fonds marins

C’est pourquoi, l’IRD a créé une plateforme régionale d’échanges sur cette thématique qui permettra de nourrir l’état des lieux et de clarifier les principaux enjeux, présents et futurs, des grands fonds marins. Trois journées sont prévues lors desquelles les représentants de 18 pays* du Pacifique pourront exprimer leurs visions, craintes, liens et espoirs sur les perspectives de connaissance, de recherche et d’usage sur les abysses.

Des territoires insulaires éloignés mais unis dans leur lien à la mer… © DILA

Les objectifs de cette plateforme sont multiples :

  • Partager collectivement les expériences, compétences, savoir-faire, usages, visions, projets, perspectives et les attentes de chacun en la matière ;
  • Échanger sur la diversité des modalités de gouvernance des grands fonds marins ;
  • Alimenter la réflexion de l’expertise collective, dont les résultats seront aussi restitués aux représentants des pays et territoires du Pacifique ;
  • Offrir un espace neutre d’échanges entre les divers représentants des pays et territoires insulaires du Pacifique sur la question.

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Quand la mer sépare autant qu’elle réunit

Ainsi, la première matinée a été marquée par des cérémonies coutumières et des discours d’ouverture. Réunis dans la salle Jacques Iakewé, les participants ont entamé un premier tour de table en abordant trois questions essentielles : « Dans quelle mesure les grands fonds marins sont-ils importants pour vous ? Quelles sont vos attentes concernant les grands fonds marins ? Quelles sont vos préoccupations à leur égard ? ». Cette approche a permis de saisir les divers points de vue qui s’affrontent dans le Pacifique.

À partir de demain, les discussions seront structurées en trois demi-journées thématisées : les connaissances sur les abysses, qu’elles soient d’ordre scientifique, traditionnelles ou autochtones ; les usages et les impacts actuels et futurs ; et enfin, les enjeux de gouvernance visant à comprendre, apprendre et intégrer la diversité des pratiques dans le Pacifique. L’objectif ultime est de parvenir, autant que possible, à élaborer une position commune pour les territoires du Pacifique. 

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« Nous devons être forts tous ensemble pour sauvegarder la mer » – Richard Poido © NeOcean

Si la Nouvelle-Calédonie adopte une position relativement claire sur la question, avec des mesures en faveur de la protection de ces espaces marins telles que la mise en place d’un moratoire pour dix ans, il est à espérer que les Nations du Pacifique opteront également pour un niveau de protection similaire. Une prochaine rencontre est d’ores et déjà prévue en fin d’année, en Polynésie française afin de continuer ce travail de concertation. ‘la ora na et rendez-vous en décembre ! 

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