ÉPISODE #2 – Partie 1/2 – Du Panama aux Galapagos

Tout le monde sur le pont moussaillons ! Nous embarquons sur le Getaway pour faire la traversée des Caraïbes et du Pacifique à la voile. Enfin… C’est François Papin, capitaine du navire, qui nous raconte les étapes de son épopée à bord de son monocoque, qui n’en est pas à son premier voyage ! En effet, fidèle destrier de ses parents depuis plus de trente ans, le Getaway a déjà fait le tour du monde et parcouru tous les océans pendant deux décennies.

Rencontré au mois de mars alors qu’il allait s’envoler vers la Guadeloupe, nous avions décidé de suivre le parcours de François et de le partager à tous ceux qui rêvent d’aventures. Tel un journal de bord, découvrez les étapes du nouveau périple du Getaway, ses matelots et leurs péripéties.

Dans ce second épisode, après avoir navigué de la Guadeloupe au Panamal’équipage a atteint Colon, une ville située à l’entrée du Canal de Panama du côté Atlantique. Ils sont restés six jours à la marina, semaine durant laquelle ils ont pris le temps de nettoyer le bateau, faire des achats, profiter d’internet, se reposer et remplir les formalités nécessaires pour passer par le canal.

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Prochaine étape du Getaway : distance moyenne de 865 miles nautiques © Google Maps

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Petite escapade en attendant le passage

Une fois que nous avons obtenu notre date de passage, nous décidons de ne pas rester à la marina, trop aseptisée et américanisée à notre goût. Nous mettons le cap sur Porto Bello. Malheureusement, notre navigation est pénible avec un vent assez fort et un courant qui génère une mer agitée et difficile. Malgré ces conditions, nous parvenons à atteindre la baie bien abritée de Porto Bello. Le mouillage est très plaisant et calme avec un beau village en vue de l’autre côté de la baie. Il y a aussi des fortifications datant du 16ème siècle, époque à laquelle les Espagnols étaient présents dans la région. Notre conseil : lire le chapitre « Les Boucaniers » du livre Caraïbes de James A. Michener qui décrit Porto Bello comme un endroit magnifique mais avec un taux de mortalité impressionnant. Le 12 mai, nous retournons à Colon, à la Marina de Shelter Bay, pour nous préparer à passer par le Canal.

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Traverser le canal de Panama, un long fleuve (pas) tranquille

13 mai 2023

Après avoir fait le plein d’eau et de carburant ainsi qu’une lessive, nous accueillons nos trois lineshandles, autrement dit nos équipiers de passage : Mario, Marco et Alex. Nous quittons la marina quelques temps en attendant l’arrivée de Ricardo, notre conseiller-pilote qui a une heure de retard, il paraît que c’est la norme… Et nous voilà en route vers la première écluse, accompagnés de deux autres voiliersTu’Ati, un Atlantis 370Alu avec à son bord une skipper médecin qui se rend auprès des professionnels de la santé des îles, et Ali Baba, un voilier de onze mètres avec un équipage de jeunes Norvégiens.

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Nous attendons patiemment à bord du Getaway © François Papin

Sur la berge, nous apercevons deux crocodiles en train de se prélasser au soleil : ce n’est pas le moment d’aller se baigner ! Juste avant d’atteindre l’écluse, nos trois bateaux s’amarrent côte à côte, avec Getaway au milieu, Tu’Ati à bâbord et Ali Baba à tribord. Et c’est parti pour la manœuvre d’entrée et d’amarrage dans l’immense écluse qui fait plus de trois cents mètres de long. Nous suivons un cargo qui se trouve juste devant nous, nous le suivrons dans chacune des trois écluses successives.

Les portes massives sont actionnées par d’énormes vérins et les remous sont impressionnants lorsque le bassin se remplit d’eau. La quantité d’eau douce utilisée en provenance du lac Gatun est stupéfiante. Le pilote nous raconte que le canal de Panama consomme deux cents millions de litres d’eau douce par an !

En fin d’après-midi, nous arrivons sur le lac Gatun, où des bouées d’amarrage sont prévues pour la nuit. Nous nous amarrons donc à une bouée par le travers, selon la méthode panaméenne, et passons la nuit. Nos trois équipiers locaux restent avec nous tandis qu’un bateau vient chercher le pilote qui rentre chez lui.

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« Nuit calme sur le lac »

14-15 mai 2023

Énième écluse

Au lever du jour, après le petit-déjeuner et une douche avec l’eau du lac, nous attendons notre conseiller-pilote, qui cette fois-ci a 1h30 de retard ! Il finit par arriver et nous nous mettons en route en naviguant au moteur sur le lac Gatun. Ali Baba ne nous suit plus car le pilote l’a jugé trop lent, il passera plus tard avec d’autres bateaux. Ainsi, nous partons, Tu’Ati et Getaway, pour parcourir les trente minutes qui nous séparent des écluses descendantes. Après une heure, Tu’Ati rencontre un problème moteur et doit s’arrêter pour effectuer des réparations pendant que nous continuons à bonne allure, atteignant presque les six nœuds.

En début d’après-midi, nous arrivons devant l’écluse San Miguel et nous nous amarrons à côté d’un Neel45composé d’un équipage français. Le skipper, peu aimable et probablement fatigué, entre immédiatement en conflit avec notre pilote qui est censé diriger la manœuvre… Bonne ambiance… Nous passons enfin les trois écluses descendantes et à 16h45, nous voilà dans le Pacifique !

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Une longue épreuve cette traversée…

Après avoir débarqué Ricardo et nos trois équipiers de passage, nous passons sous le Pont des Amériques et nous nous mettons au mouillage devant la grande ville de Panama City. On se croirait aux États-Unis avec tous ces immeubles ! Le lendemain, nous débarquons pour essayer d’acheter des fruits et des légumes mais nous ne trouvons rien de ce genre dans les supérettes. Nous optons donc pour l’achat de bières, ça, ils en ont ! Nous en profitons également pour effectuer les formalités de sortie du territoire pour s’en débarrasser le plus vite possible.

Bilan : nous n’apprécions pas ce mouillage ni le panorama urbain, nous décidons donc de partir. Même s’il n’y a pas vraiment de fenêtre météorologique, nous pensons qu’il vaut mieux être en mer, en route vers les Galapagos, que de rester ici à attendre.

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Sur la route des Galapagos

Mardi 16 mai :

Nous hissons l’annexe sur le pont, installons le régulateur d’allure et rangeons le bateau. À 14h00, on barre. Les quatre premières heures se font en moteur, puis un nuage sombre nous apporte un vent du nord d’environ vingt nœuds qui nous pousse énergiquement vers le sud. Après une heure, le vent faiblit légèrement mais reste orienté au nord, ce qui nous arrange.

La nuit est magnifique, de nombreux dauphins nous accompagnent. Leur mouvement dans l’eau crée une phosphorescence grâce au plancton, c’est un spectacle magnifique. Pendant trois jours, nous alternons entre la voile le jour et le moteur la nuit en raison du manque de vent. Le temps est assez chargé et orageux. Notre objectif est de prendre la route sud afin de contourner une vaste zone de vents faibles à inexistants.

Vendredi 19 mai :

Au lever du jour, un vent de sud-ouest se lève et nous nous retrouvons au près dans des conditions de seize à dix-huit nœuds. Le bateau gîte et tape dans les vagues ! Nous essayons de hisser la voile d’avant à endrailler, mais cela ne fonctionne pas bien, alors nous remettons le génois… Les quatre jours suivants, nous restons au près. Si ça continue, nous allons finir par devenir des dahuts !

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Naviguer au près, une sensation peu agréable © François Papin

Des jeunes fous – de Bassan ou des Galapagos ? – survolent le bateau, voire se posent sur les panneaux solaires pour se reposer. En soi, ça ne me gêne pas, mais le problème c’est qu’ils laissent des fientes partout ! J’essaie de comprendre leur intérêt pour notre bateau et finalement, je réalise. Lorsque le Getaway avance, il fait fuir des bancs entiers de poissons volants. Les fous en profitent pour essayer de les attraper en vol, volant au ras des vagues comme des avions de chasse. Lorsqu’ils sont fatigués, ils reviennent se reposer sur le bateau, plutôt pratique.

Mardi 23 et mercredi 24 mai :

Voilà une semaine que nous avons quitté le Panama. Nous nous approchons des Galapagos et devrions être au nord-ouest de l’archipel d’ici demain matin. Notre progression est bonne mais nous sommes toujours au près et ce n’est pas confortable. Nous avons hâte de pouvoir changer de cap.

En fin de matinée, un voilier apparaît sur notre AIS à seulement quatorze minutes devant nous. Il s’agit de Cleo, un catamaran danois de quatorze mètres, et il semble que nous le rattrapons. Problème : une pièce de notre régulateur d’allure se casse. Nous la démontons pour évaluer les possibilités de réparation. En attendant, nous revenons au pilote électrique. Finalement, j’arrive à réparer la pièce le lendemain. Le catamaran Cleo est toujours à proximité, suivant la même route que nous, mais il avance moins rapidement. Nous finissons donc par le distancer.

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Un paysage à couper le souffle

Jeudi 25 mai :

Nous continuons notre progression au près, avec des variations dans la force du vent mais toujours en gîte ! Enfin, le vent commence à tourner lentement… nous pouvons enfin choquer les voiles. Après six jours à naviguer serrés au près, c’est un soulagement de pouvoir enfin changer d’allure. Nous dépassons l’archipel des Galapagos et maintenant, nous nous dirigeons vers les îles Marquises… La suite au prochain épisode.

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