ÉPISODE #4 – Semaine tongienne et retour en Calédonie

Tout le monde sur le pont moussaillons ! Nous embarquons sur le Getaway pour faire la traversée des Caraïbes et du Pacifique à la voile. Enfin… C’est François Papin, capitaine du navire, qui nous raconte les étapes de son épopée à bord de son monocoque, qui n’en est pas à son premier voyage ! En effet, fidèle destrier de ses parents depuis plus de trente ans, le Getaway a déjà fait le tour du monde et parcouru tous les océans pendant deux décennies.

Rencontré au mois de mars alors qu’il allait s’envoler vers la Guadeloupe, nous avions décidé de suivre le parcours de François et de le partager à tous ceux qui rêvent d’aventures. Tel un journal de bord, découvrez les étapes du nouveau périple du Getaway, ses matelots et leurs péripéties. Dans l’épisode précédent, François Papin était arrivée en Polynésie française, où sa femme et l’un de ses fils l’ont rejoint pour quelques jours. Après avoir profité de la beauté du lagon, Jean-Mi et François mettent le cap vers la Nouvelle-Calédonie, mais d’abord escale à Tonga… pour découvrir la culture tongienne.

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Arrivée en terre tongienne

Mercredi 6 septembre

Nous arrivons au petit matin en approche de Vava’u, aux Tonga. Cet archipel est constitué d’îles plutôt basses, comparées à Tahiti ou aux Marquises, avec un point culminant à 130 mètres. Elles sont recouvertes d’une végétation dense et nous sommes accueillis par plusieurs couples de baleines, dont l’une nous fait l’honneur d’un saut magnifique.

La baie de Neiafu, la ville principale, est un mouillage très bien protégé de tous les vents, ce qui est appréciable pour se reposer après deux semaines de navigation. Nous procédons aux formalités d’entrée sur le territoire, avec venue des autorités à bord et nombreux formulaires à remplir, mais tout se passe bien, l’ambiance est aimable à défaut d’être souriante.C’est aussi le moment d’apprendre que nous ne sommes pas mardi 5 mais mercredi 6 Septembre. Tonga s’est aligné sur les îles Fidji qui se trouvent de l’autre côté de la ligne de changement de date. Nous réglons donc les appareils du bord… ou comment faire disparaître 24h de manière instantanée.

Nous profitons du mouillage tranquille pour faire les petites réparations : démontage de la barre qui grince toujours malgré notre bricolage en mer et réparation sur un coulisseau de grand voile qui s’est arraché en navigation. Nous pensons passer quatre à cinq jours ici puis repartir en direction de Nouméa.

C’est l’occasion de promenades à terre, dans le village de Neiafu, au marché bien achalandé en légumes et dans les différentes épiceries qui bordent la rue principale. Il y a ici de nombreux touristes japonais, venus faire de la plongée sous-marine et nager avec les baleines. En consultant la météo quotidiennement, nous apprenons qu’une dépression importante va se creuser entre les Tongas et la Nouvelle-Calédonie, avec son cortège de vents forts. Nous décidons donc d’attendre quelques jours de plus avant de partir pour laisser le mauvais temps se dissiper. La veille du départ, nous nous retrouvons à boire l’apéritif sur un voilier Français qui se rend comme nous à Nouméa. Cet équipage est parti de France et est passé par les canaux de Patagonie, une sacrée aventure !

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Dans la baie de Neiafu… on est bien ! © François Papin

Jeudi 14 septembre

Nous faisons notre sortie officielle des Tonga, avec la même quantité de documents administratifs à remplir qu’à l’arrivée. Dans l’après-midi, nous nous dirigeons tranquillement vers la sortie de l’archipel et décidons finalement de passer une nuit supplémentaire au mouillage dans une jolie petite baie verdoyante.

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Périple agité vers Nouméa 

Vendredi 15 septembre

Au matin, nous appareillons pour Nouméa. Nous sommes suivis de près par nos copains français qui ne tardent pas à nous dépasser avec leur magnifique voilier, plus rapide que le nôtre. On se salue à la VHF et on se donne RDV à Nouméa. Nous profitons d’un vent d’Est 17 noeuds qui nous pousse au vent arrière, le bateau roule mais on avance bien, il fait beau.

Comme à notre arrivée dans l’archipel, nous croisons la route de plusieurs groupes de baleines. Je tape sur la coque du bateau pour faire du bruit car elles croisent vraiment notre route sans se presser. Je ne sais pas si elles nous entendent arriver? Le vent est de plus en plus fort au fil des jours, la houle augmente aussi.

Samedi 16 septembre

La deuxième nuit, le Genois se déchire, il y a un trou d’1,5m en plein milieu! Nous enroulons la voile qui est désormais inutilisable. Nous continuons à faire route sous grand voile seule le temps d’aller chercher et de mettre en place le foc à endrailler sur l’étai larguable. La dépression que nous surveillons depuis plusieurs jours se creuse en ce moment entre la Calédonie, qui est en alerte orange vents forts, et le sud des Fidji, c’est-à-dire exactement sur notre route.

Dimanche 17 septembre

La nuit suivante, c’est le mousqueton de la drisse du foc qui casse, le foc tombe sur le pont et la drisse se retrouve en tête de mât. Vu la houle et les mouvements du bateau, pas question de grimper pour aller la récupérer! Nous continuons donc sous Grand Voile seule à 2 ris par 25 noeuds de vent. Le ciel est nuageux, il fait de plus en plus frais. La nuit, nous restons la plupart du temps à l’intérieur et ne sortons plus dans le cockpit que pour les tours de veille : on devient frileux à vivre sous les tropiques !

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Le temps se gâte… © François Papin
Lundi 18 Septembre 

En fin de nuit, vers trois heures du matin, nous passons la ligne de changement de date. A partir de maintenant, notre longitude diminue au lieu d’augmenter, nous nous rapprochons de la France au lieu de nous en éloigner. Le quatrième jour, l’AIS nous prévient qu’il y a un bateau à moteur néozélandais qui se trouve à 6,5 milles sur notre arrière tribord, je sors dans le cockpit et fais un tour d’horizon: personne. Je suis surpris qu’on ne voit pas ce bateau à une distance qui me semble assez faible, c’est peut-être dû aux trois mètres de houle. Pour la première fois depuis notre départ de Guadeloupe, nous prenons nos repas à l’intérieur, vivement la saison chaude !

Mardi 19 septembre

Cinquième nuit depuis les Tonga : cette fois c’est le pilote électrique qui s’éteint et le bateau qui commence à aller où bon lui semble, les voiles qui claquent et la houle qui nous fait rouler encore plus que d’habitude.Je réveille Jean-Mi pour qu’il vienne m’aider, on reprend le contrôle du bateau et me voilà à démonter le système électrique du pilote à la lueur de la lampe frontale. Je débranche des fils, les rebranche, enlève puis remets des fusibles…Finalement, au bout de plusieurs essais, le pilote accepte de repartir, ouf ! Jean-Mi, tu peux retourner te coucher! Nous poursuivons notre route au vent arrière, nous sommes maintenant au sud des Fidji.

Jeudi 21 septembre

Durant la septième nuit de navigation, le vent baisse de plus en plus et le bateau se met à rouler dans la houle, avec la grand voile qui claque. Je décide de lancer le moteur, qui ne veut pas démarrer! Mauvaise surprise. Au bout de plusieurs essais, il finit quand même par partir mais il a un régime irrégulier, ça sent le bricolage en perspective. 

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Retrouvailles au pays

Dimanche 24 Septembre 

Dans la nuit, nous approchons de la Nouvelle-Calédonie, il y a d’importantes lumières qui clignotent sur la côte, on dirait un énorme supermarché ; c’est sans doute un champ d’éolienne. Ajoutées au halo lumineux de l’usine du sud, ça sent bon l’activité humaine ! Nous prenons le canal de la Havannah avec un vent assez soutenu dans le nez, on s’aide du moteur.

Au petit matin, nous passons le Cap N’Dua, puis le canal Woodin et enfin Nouméa. On est arrivés ! Retrouvailles avec la famille; Kiam, mon grand fils, que je n’ai pas vu depuis sept mois, Julie et Ilann, qui sont venus nous voir à Tahiti, et Sierra, notre Border Collie qui me reconnaît et me fait une fête d’enfer !

Voilà, le voyage est arrivé à son terme, une belle aventure de sept mois et presque 9000 milles marins, soit 17 000 kilomètres à la vitesse moyenne de 9km/h. Jean-michel va rester un mois en Calédonie pour visiter un peu avant de repartir pour la France. Et pour moi, retour au travail : à bientôt chez Speed Marine !

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Terre (calédonienne) en vue ! © François Papin

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