En Nouvelle-Calédonie, on ne compte plus les afficionados des sports nautiques, tellement ils sont nombreux. Kitesurf, planche à voile, hobie cat… à chacun son activité fétiche. Autant de temps passé sur le plan d’eau signifie donc que les voiles sont mises à rude épreuve. Quand les alizés soufflent et que le soleil tape fort, ça ne rigole pas alors il faut chouchouter les voiles.

Jean-Christophe Tardieu – alias JC pour les copains- en a fait son métier. Avec ses doigts de fée, il est capable de réparer les petits comme les gros bobos. Quand il n’est pas sur l’eau, il est derrière sa machine à coudre. La rédaction a voulu en savoir plus sur le métier de maître voilier, chez A toutes voiles.

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Points de suture

Voiles déchirées, trouées ou abîmées, le maître voilier a plus d’une aiguille dans son sac, pour réparer les voiles. Dans son entrepôt, Jean-Christophe passe ses journées à coudre tous types de voiles : optimiste, kite, windsurf… rien ne lui fait peur, pas même lorsque l’installation fait plus de 100 m2 ! Là, ce n’est pas une heure de travail mais plutôt vingt-quatre heures. 

Chaque semaine, JC répare en moyenne une dizaine de voiles. Après avoir étudier minutieusement l’ampleur des dégâts, le voilà qui s’installe derrière sa machine à coudre… grandeur voile de bateau, et non tee-shirt pour hommes. Pour coudre d’aussi grands volumes, le couturier a dû se faire – littéralement – son petit trou dans le sol pour que lui, la machine et la voile puissent être à la même hauteur lors de la couture et ainsi éviter toute pliure. 


Son quotidien, c’est plutôt dacron et monofilm que satin et dentelle ; et la Fashion Week n’a qu’à bien se tenir ! Sa machine à coudre fait deux fois voire trois fois la taille d’une machine classique utilisée dans le monde de la mode ; les bobines et les aiguilles sont imposantes et pourtant elles font le même travail : couture à six temps ou à deux temps, à chaque voile son tracé. 

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Un travail de titan

Si le métier relève de la passion, il n’en est pas moins difficile. Jean-Christophe passe de longues heures au sol, à genoux, le dos courbé pour panser les plaies de ses protégées. Alors il a investi dans des genouillères – et aussi dans les consultations chez l’ostéopathe. Un métier artisanal qui demande rigueur et précision. JC ne délaisserait son activité pour rien au monde et pourtant, rien ne le prédestinait à travailler dans les bateaux

Ce Parisien a quitté la grande ville à l’âge de 16 ans pour La Rochelle. Lui qui voulait être mécanicien automobile, c’est à ce moment-là qu’il découvre la navigation, achète son premier dériveur et pratique le kitesurf pour la première fois. De fil en aiguille, il étudie la maintenance des bateaux puis découvre la voilerie lors d’un stage en alternance. Sa première voile ? Celle d’un catamaran qui faisait le tour du monde.

20 ans plus tard, Jean-Christophe habite au bout du monde et n’a toujours pas délaissé son dé à coudre, lui qui a appris la couture sur le tas. Sa rencontre avec Yves Ecarlat en 2012 l’emmène jusque sur notre Caillou, où ils fondent ensemble une voilerie, avant de poursuivre leur route chacun de leur côté il y a deux ans.  

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Au travail ! © NeOcean

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Toutes voiles dehors

Si la réparation reste le cœur de son activité, le maître voilier s’est lancé un autre défi : fabriquer des voiles neuves. JC se rend généralement sur les bateaux pour prendre les mesures puis travaille conjointement avec une voilerie néozélandaise. Si c’est un As de la couture, pour le dessin en revanche, il préfère déléguer. Il reçoit ensuite les morceaux de la voile qu’il assemble lui-même, à l’aide de sa fidèle machine à coudre. 

Il faut avoir le souci du détail mais aussi être créatif et surtout, avoir des biscoteaux car les voiles peuvent parfois peser jusqu’à 150 kg ! Alors il faut des marins aguerris pour aider Jean-Christophe et surtout, une camionnette – pas une voiturette- pour transporter les géantes. Pas d’inquiétudes, le maître voilier a le pied marin : il a vécu quatre ans sur son monocoque de 11 mètres avant de rejoindre la terre ferme. He oui, c’est ce qui arrive, quand on a été charmée par une sirène

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