Épisode 5 – En juin, ça passe ou ça casse… 

À l’abordage, moussaillons ! Cette année, on prend le cap vers de nouvelles aventures maritimes ! Le Petit Poucet met les voiles à nouveau, mais cette fois avec un équipage prêt à fendre les vagues et à défier les océans. Vous avez bien sûr reconnu le fidèle Blade Runner, de nouveau en course pour la Groupama Race New Caledonia qui commence le 15 juin prochain. 

La rédac’ l’avait annoncé, la Groupama Race serait une aventure hors norme. Ce mois de juin l’a confirmé. De la tension du départ à la casse du safran, en passant par des manœuvres sous pression et une arrivée improvisée à Koumac, ce n’est pas la ligne d’arrivée que la team du Blade Runner a franchie, mais celle du courage. Damien Meunier vous embarque pour vous raconter ce mois d’intensité salée. 

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En ordre de marche 

Début juin, c’est l’effervescence. Le bateau est fin prêt, enfin presque. On glane encore quelques éléments de sécurité obligatoires, on termine les bricoles à bord (dont un porte-gobelet flambant neuf). On pourrait croire que c’est gadget, mais en mer, un café bien calé, ça vaut de l’or ! À J-2 du départ de la Groupama Race, on s’offre un petit coup de propre sous la coque, histoire de glisser comme une fusée et maximiser nos chances d’arriver samedi 21, pour l’apéro. Ma team est au taquet, les sacs sont bouclés, les repas sont prêts et les manœuvres révisées. On prend nos quartiers sur le ponton du CNC, à côté de nos concurrents, et pas mal placé ! On est tout devant, en mode premier de la classe, avec une vue imprenable sur l’agitation qui monte au village. Ça sent la grande course, le grand large. On est prêts ! 

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Tous les élèves avant la grande sortie scolaire © NeOcean

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Ça passe ou ça casse… 

Samedi 15 juin, sonne 10h, l’heure du grand départ. On file. On file même bien. Trop bien ? Allez savoir. On est dans le bon tempo, devant Boudicea, au coude à coude avec Too Farr Out, et dans notre tête, on vise le Grand Passage avec douze heures d’avance sur nos prévisions les plus optimistes. 

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Poussez-vous le Petit Poucet est dans la place ! © Gwenaëlle Ginot-Seux
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RIP… © Damien Meunier

Le bateau réagit, l’équipage aussi. L’ambiance est bonne, concentrée, efficace. On ajuste, on pousse, on tient. Et puis, la vague de trop, la glissade en trop et le bateau qui part dans un surf trop rapide, trop engagé. Je n’oublierais jamais le bruit du craquement qui résonne encore… Le genre de son que tu reconnais tout de suite. Le safran a rompu. Plus rien pour gouverner. Juste l’instinct, la solidarité à bord, et un safran de secours pas si ridicule, finalement. En quelques minutes, chacun prend sa place. Le spi est ramené, la situation maîtrisée. On sait que la Groupama Race c’est fini pour nous, mais on reste focus, parce qu’il faut quand même rentrer. On enquille avec 18 heures de moteur, une météo pas facile, pour arriver à Koumac, exténués, mais entiers. 

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Jamais à terre ! 

Samedi 21 juin, on retrouve tous les équipages à la remise des prix avant le débrief d’équipe le lendemain. Comme un dimanche en famille, on se retrouve tous à la maison pour un bilan à chaud et un bon repas. On vide les glacières, on finit les vivres, on refait la course autour de la table. L’abandon est digéré, mais pas oublié. Pas encore en tout cas. Depuis, les réflexions vont bon train. “Qu’est-ce qu’on fait ? On répare ? On reconstruit ? Nous-mêmes ? En partie ? Pour du temporaire ou du définitif ?” La réponse, comme souvent, ce sera “un peu de tout”.

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Debrief stratégique © Damien Meunier

On va commencer par réparer le support du safran perdu et reconstruire la partie cassée à partir de croquis récupérés en Australie grâce aux camarades de Sistership. Et à terme, on prévoit un beau châssis inox, avec une pelle fiable et bien profilée. C’est Antoine qui s’occupe du design ! 

Le samedi 28 sonne le début des travaux. Avec Zoé, on démonte le safran de secours pour le reconstruire. Il nous a sorti d’un beau pétrin, alors il mérite un peu d’amour. On ne partira plus jamais sans lui, c’est sûr. Le lendemain, je reprends la route du Nord pour le boulot. J’en profite pour passer du temps à bord de Blade Runner. C’est à la fois doux et étrange. La terre rouge de la mine colle aux chaussures, s’invite à bord. Le bateau est silencieux. Trop calme. J’avais oublié à quel point on dort bien ici quand ce n’est pas en navigation, les yeux rivés sur les copains de quart et les récifs au radar. C’est rageant d’être si près de tous ces magnifiques îlots du nord et de ne pas pouvoir y mettre les voiles. L’envie du large revient toujours dès que je pose un pied à bord. 

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On the road © Damien Meunier

Et puis il y a tout le reste. Le tissu de talents, de savoir-faire, d’idées, de copains qui se mobilisent. Un shaper dans son garage, des architectes navals, des mains tendues, des idées, des sourires. Il y a la cagnotte Leetchi, aussi, lancée pour qu’on puisse remettre Blade à flot. Et tous vos messages, vos partages, vos élans. Ça nous touche, vraiment. Le bateau n’est pas encore prêt. Mais moi, je le suis ! 

Damien 

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