Au cœur de l’immensité océanique, un monde insoupçonné se cache sous la surface, peuplé de montagnes secrètes et de feux invisibles. Un royaume de géants endormis qui façonnent discrètement les paysages marins et alimentent l’imaginaire collectif.
Si le commun des mortels ne connaît pas l’existence des volcans sous-marins, quelques érudits en savent davantage sur ces merveilles géologiques, intrigantes et redoutables. Car derrière la beauté de notre lagon et la richesse de nos écosystèmes, ce sont ces colosses qui sont aux manœuvres. Aussi, des questions émergent : comment influencent-ils les océans ? Quel est leur rôle dans le bouillonnement de la vie sous-marine ? Ces géants sont loin de nous avoir révélé tous leurs secrets.
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Les volcans sous-marins : ces colosses cachés
Ces formations géologiques, bien que moins médiatisées que leurs homologues terrestres, sont pourtant tout aussi impressionnantes. En majorité, leur apparition résulte d’une fissure sur le fond des océans par laquelle le magma peut entrer en éruption. Au-delà des risques sismiques liés à ces réveils, ils émergent parfois pour créer de nouvelles îles ou disparaissent dans l’obscurité des abysses.
Tout comme leurs cousins, les volcans sous-marins peuvent être endormis ou actifs avec des éruptions ponctuelles ou continues dans le temps. Cependant, en raison des différences de température et de pression, la plupart des éruptions sont de nature effusive, caractérisées par l’émission de lave fluide. Et fait surprenant, lorsque cette lave entre en contact direct avec l’eau, elle se solidifie rapidement formant des structures en forme de coussins appelées « pillow lavas ». Qui a dit que les poissons n’avaient pas de fournisseurs d’oreillers ?
Composante essentielle du paysage océanique ces titans sont répartis à travers le monde. Les régions du Pacifique, de l’Atlantique et de l’océan Indien abritent un grand nombre de ces derniers. Ils se forment principalement le long des dorsales océaniques et à proximité des zones de subduction. À ce jour, des milliers de volcans sous-marins ont été recensés à travers le monde et de nouvelles découvertes sont régulièrement faites. Cependant, il est difficile de donner un chiffre précis face à la grandeur des abysses encore inexplorés.
Intrigué par ce qui est mystérieux, l’homme cherche à en savoir davantage sur ces étranges montagnes. Déjà observés au XVIIIe siècle, ce n’est qu’au XIXe siècle que les premières expéditions scientifiques ont été organisées pour explorer ces phénomènes d’activités volcaniques. Aujourd’hui, grâce aux avancées technologiques, les scientifiques continuent à sonder leurs secrets, surveiller leurs activités et découvrir de nouveaux monts.
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Des colosses aux rôles méconnus
La Nouvelle-Calédonie, située sur la ceinture de feu du Pacifique, est particulièrement riche en volcans sous-marins. On recense près de 100 volcans sous-marins actifs, témoins d’une activité géologique intense dans cette région du Pacifique. Leur répartition géographique est étroitement liée à la tectonique des plaques et aux zones de subduction, où la plaque pacifique plonge sous la plaque australienne, créant ainsi des conditions propices à l’éruption de ces volcans.
Ces formations géologiques jouent un rôle crucial dans la compréhension des processus géologiques et des écosystèmes marins de la région. Depuis 2015, des études sont menées entre l’arc volcanique Tonga et l’Australie, sur zone particulièrement fertilisée qui alimenteraient le cycle du carbone. Des microalgues présentes en nombre seraient nourries par les volcans sous-marins qui rejetteraient une dose importante de fer. Une expédition a été menée par les équipes du CNRS et de l’IRD en 2019 pour essayer d’en savoir plus sur ce phénomène.
Les impacts des volcans sous-marins sont encore pour la plupart méconnus, mais la communauté scientifique s’intéresse de plus près à ces titans des mers. Leur recensement évolue tous les jours grâce aux avancées technologiques et le leur nombre vertigineux ouvrent des sujets d’études encore insoupçonnés. Philipson Bani, chargé de recherche à l’IRD au laboratoire magmas et volcans souligne notamment l’impact que seraient susceptibles d’avoir ces monts sur la circulation de l’eau dans nos océans
« Si vous avez un grand nombre de reliefs, ils peuvent avoir un impact sur la circulation de l’eau. Imaginez maintenant cet impact avec 19 000 nouveaux cols qui apparaissent à l’échelle du monde. Il devient alors important de considérer leur rôle. »
Philipson Bani nous donne le vertige
Les différentes découvertes ont également montré que les cheminées hydrothermales associées aux volcans sous-marins abritent une biodiversité exceptionnelle adaptée aux conditions extrêmes de chaleur et de pression. Cependant, cette richesse biologique est également vulnérable aux activités humaines et aux changements environnementaux. La pollution, la surpêche et le changement climatique menacent cet équilibre fragile.
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Ne pas se fier aux apparences
Face à ces constats, l’étude et les recherches autour des volcans sous-marins revêtent une importance capitale. La surveillance géologique permet de détecter les signes précurseurs d’une éruption et d’anticiper les risques associés, notamment en matière d’activité sismique, de glissements de terrain et de tsunami.
Parallèlement, la mise en place de zones marines protégées autour des volcans sous-marins permet de préserver la biodiversité et de limiter l’impact des activités humaines sur ces écosystèmes fragiles.
Les volcans sous-marins en Nouvelle-Calédonie – mais aussi partout dans le monde – sont à la fois des témoins de l’activité géologique passée et présente de la région. Malgré leur apparence intimidante, ces géants sont des acteurs essentiels dans la création et le maintien de la biodiversité marine. Leur stature offre des habitats uniques pour la faune et la flore, tandis que leurs mouvements nous permettent de mieux comprendre les humeurs de notre précieuse planète. Ne serait-il pas temps de franchir la barrière du mythe pour apprivoiser ces titans ?
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