Comme chaque année, entre novembre et mars, les tortues grosses têtes mettent le cap sur le bonhomme de la Roche Percée pour déposer leurs œufs sur la plage.  Celle-ci devient alors le deuxième plus important secteur de ponte des tortues grosses têtes dans le Pacifique Sud. De quoi offrir des nuits magiques aux Calédoniens venus assister au spectacle… à condition de respecter certaines règles. Présentation d’un phénomène naturel exceptionnel.

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Si petite face à ce long voyage qui l’attend © Bwärä

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Les tortues grosse tête, une espèce menacée

C’est un moment unique que seuls quelques privilégiés ont la chance d’observer : sous le ciel étoilé de la Roche Percée, dans un silence à peine interrompu par le roulement des vagues, une tortue grosse tête se fraie un chemin sur le sable pour venir y déposer une centaine d’œufs. Un spectacle intimiste d’une quarantaine de minutes, empreint d’un certain recueillement : un œuf sur mille, seulement, deviendra une tortue adulte. Une fois le nid rebouché, il faudra deux mois aux œufs pour éclore avant de faire le chemin inverse jusqu’au lagon pour les plus chanceuses des bébés tortues. La tortue grosse tête – aussi appelée tortue caouanne -, atteint sa maturité sexuelle entre 20 et 30 ans ; les femelles viennent alors effectuer leurs mises à bas tous les 2 à 8 ans. Un cycle de reproduction long, alors même que cette espèce a vu sa population diminuer de 90% en l’espace de 50 ans…

La Nouvelle-Calédonie abrite deux sites de ponte majeurs du Pacifique Sud pour les tortues marines : les atolls d’Entrecasteaux et Chesterfield pour les tortues vertes, et donc – vous l’aurez compris – la plage de la Roche Percée pour les tortues grosses têtes. Un spot véritablement exceptionnel… mais aujourd’hui menacé. En effet, l’endroit est soumis à de nombreuses pressions néfastes pour les tortues : la fréquentation de la plage, les chiens errants, l’aménagement du littoral… Retrouvée dans les archives de la seconde guerre mondiale, une lettre d’un soldat néo-zélandais à son épouse évoquait son émerveillement devant le spectacle d’une cinquantaine de tortues grosses têtes venant pondre chaque nuit sur le site de la Roche. Aujourd’hui, on ne décompte plus qu’une cinquantaine de tortues grosses têtes… lors d’une saison entière !

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L’observation doit toujours être encadrée par des professionnels ! © WWF

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Des visites encadrées pour sensibiliser le public

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L’asso des tortues © Bwärä

Afin de pouvoir permettre au public d’observer les tortues sans les déranger, la Province Sud et l’Aquarium des Lagons – en collaboration avec l’association Bwärä Tortues Marines soutenue par WWF – ont expérimenté en 2016 un projet de visites encadrées sur la plage de la Roche Percée. Un petit groupe de visiteurs, sous la surveillance de professionnels et de bénévoles, peut donc assister à la ponte, puis à la naissance des tortues. Aucun impact négatif de cette initiative n’a été relevé à date. Parmi les règles à respecter : rester à plus de dix mètres des spécimens présents, ne surtout pas les exposer à la lumière, éloigner les chiens de la plage… Tout manquement à ces directives constitue d’ailleurs une infraction passible d’une amende pouvant aller jusqu’à un million de francs (atteinte à une espèce protégée).

Au-delà de ce volet éducatif et de sensibilisation du grand public, l’association Bwärä Tortues Marines, créée en 2006, a pour mission de protéger les tortues. Elle œuvre ainsi grandement au recensement de la population et à la préservation des nids à l’aide de dispositifs qui les protègent des attaques de chiens errants. Une fois la ponte effectuée, les tortues adultes sont baguées ou photographiées, leur carapace mesurée et l’ensemble de ces informations enregistrées dans une base de données afin de reconnaître les individus lors de leur prochain passage. Ce travail minutieux mène ensuite à la publication de rapports scientifiques précieux pour le pays. Chaque saison, une vingtaine de bénévoles peut donc, moyennant deux semaines de formation, rejoindre les éco-gardes de l’association, habilités à surveiller la plage. Avis aux amateurs d’aventure et aux passionnés de nature !

Plongez dans l’univers merveilleux de WWF qui part à la rescousse des tortues grosse tête de Calédonie © WWF

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La Nouvelle-Calédonie, l’élève modèle

Aujourd’hui, six des sept espèces vivantes de tortues marines sont considérées comme menacées ou gravement menacées. Un constat glaçant quand on sait qu’elles ont côtoyé les dinosaures et surmonté toutes les crises climatologiques jusqu’à présent. Saluons donc vivement le travail de protection et de sensibilisation réalisé en Nouvelle-Calédonie, tout en espérant que d’autres pays suivront notre exemple : au Costa Rica, ce sont des centaines de touristes qui s’agglutinent sur les plages de ponte pour des selfies avec les tortues, à grands renforts de flashs… Voilà donc bien un domaine dans lequel le Caillou a une longueur d’avance !

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