Qui ne s’est jamais baigné dans les eaux cristallines de l’Île des Pins ? Qui n’a jamais mis son équipement de plongée pour aller découvrir les beautés du récif ? A Kunié, des observateurs du RORC – Réseau d’observation des récifs coralliens de Nouvelle-Calédonie – se sont aventurés dans leur lagon, en baie de Gadji. 

Leur mission : observer et collecter des données pour connaître l’état de santé des récifs. Ils n’ont pas hésité à y passer plusieurs heures, équipés de leurs masques et tubas… le tout en apnée ! Trois stations ont été visitées ; elles n’avaient pas été étudiées depuis 2019. L’action a été coordonnée sur place par l’ŒIL – l’observatoire de l’environnement – et le CCCE – le comité consultatif coutumier environnemental. Elle est financée par la Fondation de la Mer et SOS Corail.

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Aïe ça fait mal !

Direction la baie de Gadji, à la pointe Nord de l’Ile des Pins. Un endroit particulièrement apprécié des plongeurs pour ses fonds marins exceptionnels – et surtout protégés. Dans cette zone, deux récifs, celui de Daa Yetai et Kanga Daa, ont été scrutés avec attention. Rien n’échappe au regard des plongeurs ; certains observent les poissons, d’autres mesurent les bénitiers… d’autres encore s’attèle à prendre des photos et à observer les holothuries et les éponges. Bref, tout ce qui constitue l’habitat est passé en revue. 

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La “dream team” en tenue de combat © RORC

Bilan : petite forme pour ses deux stations. Les observateurs du RORC ont constaté une destruction du site. Des coraux cassés, un morceau de platier tombé sur les fonds … « ça fait partie de la nature » précise Sandrine Job, qui a coordonné l’équipe sur place. Alors qui a fait du mal à notre beau récif ? Réponse : Lucas et Niran, les deux plus gros cyclones de ces dernières années. La houle cyclonique n’a pas épargné le petit monde de Nemo.

La bonne nouvelle – oui, il y en a une – c’est que les observateurs ont déjà observé une régénération coralienne sur le site. Des jeunes coraux ont commencé à pousser, car la nature fait bien son travail. Les oursins y sont aussi très nombreux. D’après les spécialistes, ils contribuent au broutage des algues, qui favorise en retour la croissance des coraux et l’implantation des larves coralliennes.

“Cela montre une fois de plus que les récifs de Calédonie sont résilients. C’est encourageant. Ce genre d’information permet de montrer que c’est important de faire un suivi régulier sur le long terme, car un récif, ça évolue tout le temps.”

Sandrine Job

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La station Daa Kouguié a la patate !

Sur les trois stations, celle de Daa Kougnié est celle qui a le moins souffert. Les observateurs ont recensé un grand nombre de jeunes coraux, dont le diamètre est inférieur à 5 cm. Du coup, la station a été classée dans le TOP 5 des récifs du RORC en 2023 ! 

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Les petits poissons dans l’eau… © RORC

A chaque analyse, les habitats, les poissons, les invertébrés et les perturbations sont identifiés. Les atouts de Daa Kougnié ? un récif très dynamique, qui possède un fort potentiel de régénération et de croissance selon les spécialistes. La faune marine y est exceptionnelle : oursins, poissons-perroquets et chirurgiens… il y a du beau monde qui se promène entre les coraux. Des espèces herbivores qui sont essentielles à la bonne santé des récifs de Nouvelle-Calédonie car les mauvaises algues sont ainsi grignotées par nos amis – ils contribuent alors à maintenir un récif sain. En clair, tous les voyants sont au vert pour Daa Kouguié ! 

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© RORC

La suite, c’est quoi ?

Prendre des photos et observer les fonds marins, c’est cool mais il faut bien que ces expéditions aient une finalité, et elles ont en une : connaître l’évolution du récif au fil du temps. Toutes les photos et données récoltées sont en cours d’analyse et elles seront croisées avec les données statistiques des années précédentes. Le RORC enregistre des suivis sur les stations de l’Île des Pins depuis 2013. 

L’autre intérêt de continuer à étudier la santé des récifs, c’est parce que le RORC entame ensuite un travail de sensibilisation auprès de la population. 

“Les observateurs du RORC sont ainsi valorisés, car leurs données sont utilisées pour faire des bilans, ça valorise l’initiative. Parler des récifs ça permet de mieux les préserver.”

Sandrine Job

Prochaine mission pour le RORC : étendre leur réseau de suivi ; toujours dans le Sud, mais côté Grande Terre cette fois-ci. Début novembre, avec l’ŒIL et le CCCE, trois stations d’observation des récifs vont être créées. Elles se situeront dans la région de Yaté et de Goro. Un projet qui selon Sandrine Job, répond aux préoccupations des habitants. 

Bon à savoir : 88 récifs sont suivis annuellement par une centaine de bénévoles en plongée ou en apnée sur l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie.

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