Nouveau mois, nouveau projet ! Vendredi 1er mars, une bouée a été inaugurée et mise à l’eau sur les quais scientifiques à Nouméa. Et ce n’est pas n’importe quelle bouée : celle-ci est intelligente et elle vise à en savoir plus sur les capacités de notre lagon à piéger du carbone.
À l’initiative de Sophie Bonnet, directrice de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et financé par la bourse européenne ERC Consolidator, ce projet HOPE est un l’aboutissement de plusieurs années de recherche. La bouée a été mise à l’eau devant les yeux de nombreux acteurs qui ont participé au projet. Champagne !
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HOPE : comprendre le rôle de l’océan tropical grace à une bouée
Il y avait du monde ce vendredi matin sur les quais scientifiques à Nouméa et notamment beaucoup de chercheurs de l’IRD. Et il y avait surtout la star du jour, HOPE, une bouée jaune de 8,5 mètres de haut sur 5 mètres de diamètre. Celle-ci est le bébé d’une chercheuse, Sophie Bonnet, qui a imaginé ce projet il y a bientôt quatre ans : comprendre le rôle de l’océan tropical dans le piégeage du CO2.
Le discours de Sophie le rappelle : jusqu’à récemment, les océans tropicaux étaient considérés comme peu efficaces pour piéger le carbone car pauvres en éléments nutritifs. Pourtant, des études récentes montrent que le Pacifique est un lieu privilégié de « diazotrophe », des organismes microscopiques qui agissent comme des engrais naturels et stimulent la chaine alimentaire. Cela favorise ainsi le piégeage du carbone.
Cependant, ces pistes de recherche doivent être documentées. C’est là qu’HOPE entre en jeu. Ce nom signifie – les chercheurs de l’IRD adorent les acronymes farfelu... – « How do diazotrophs shape the ocean biological carbon pomp ? ». Comprenez : « Comment les diazotrophes façonnent-ils la pompe à carbone biologique de l’océan ? ». Durant deux ans d’abord, HOPE va mesurer la variabilité de la biodiversité du plancton, des flux de carbone associés et des courants, à la surface et au fond de l’océan, autour du récif Aboré. Les deux années suivantes, HOPE sera déployée dans des eaux plus tempérées. L’idée est de comprendre le processus mis en jeu dans le contrôle de la séquestration de carbone par l’océan.
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De nouveaux espoirs pour modéliser le changement climatique
C’est là que la technologie entre en jeu. HOPE est une première mondiale : c’est la seule bouée aussi instrumentée déployée dans l’océan. Petit bijou de technologie, elle a été faite sur mesure avec l’aide de Jean-Michel Grisoni, chercheur au CNRS, et la société aixoise Mobilis. La bouée est munie de plusieurs panneaux solaires, de capteurs, d’automates et de six lignes de sept-cents mètres de long, équipées elles-mêmes d’instruments pouvant récolter simultanément les données à la surface et au fond de l’océan.
Au-delà d’être un petit bijou de technologie, HOPE porte un espoir non dissimulé afin de trouver des réponses face au changement climatique. En effet, les projections du GIEC ne prennent pas totalement en compte le fait que les océans tropicaux pourraient, eux-aussi, absorber du carbone. Ces océans couvrent environ soixante pourcents de la surface globale des océans : comprendre leur rôle permettrait ainsi de quantifier et d’intégrer ces données dans les modélisations du climat…
Pour l’heure, la joie et l’impatience se lisent sur les visages de tout le monde. France Bailly, la représentante de l’IRD en Nouvelle-Calédonie et heureuse marraine de cette bouée, a pu féliciter l’audace de Sophie avant de baptiser HOPE, encore à quai. Une corde, de la ficelle et deux lancés francs ont eu raison de la bouteille de champagne, qui s’est écrasée contre la bouée ! Tonnerre d’applaudissements pour un baptême réussi ! Il ne reste plus qu’à lui souhaiter bon vent au large d’Aboré, où elle a été installée ce week-end.
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