C’était l’un des plus célèbres navires abandonnés de Nouméa… Alors qu’il rouillait là, amarré depuis près de quinze ans au quai des caboteurs, le Grete Theresa – beau bébé de plus de mille tonnes – a été déplacé vers sa dernière demeure : un bassin de la rade où il sera démantelé, puis détruit. Une décision longtemps attendue par les défenseurs de l’environnement, soucieux des risques de pollution que le pétrolier, prêt à couler, pouvait engendrer.

Grete Theresa
Un gros bébé à l’abandon à l’aube de son dernier voyage © DNC

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Destination finale…

Il aura donc fallu attendre le décès de Louis Kotra Uregei – le président de l’USTKE disparu en octobre dernier et à qui le navire appartenait – pour voir déplacée cette épave qui occupait les quais depuis des années, au point de faire partie intégrante du décor nouméen. Le Grete Theresa, désormais seule propriété de la Stiles – la Société de Transport des Îles -, a entamé il y a quelques semaines son dernier voyage entre la petite et la grande rade, tiré par deux remorqueurs. Une manœuvre délicate étant donné le poids du navire et les conditions venteuses. Le voilà désormais en « sécurité » en cette saison cyclonique.

Surtout, le pétrolier a pu rejoindre sa destination finale sans aucun accident sur le plan environnemental. Si un tel engin avait dû couler, cela aurait posé un problème au regard, par exemple, de l’état de ses cuves… Le directeur adjoint du Port autonome de Nouméa, Brice Kiener, détaillait récemment les mesures prises pour parer à tout fiasco écologique lors de la manœuvre :

« Nous avons dépollué le bateau au préalable. On a récupéré toutes les eaux noires, les eaux grises ainsi que tous les polluants – comme les batteries ou les éventuelles peintures liquides – qui auraient pu faire de l’irisation sur la zone ».

On se demande alors si le Grete Theresa a disparu de la carte interactive des épaves pleines d’hydrocarbures imaginée par Raphaelle Danis dans son projet Clean Up Wrecks 

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Les navires en fin de vie, une problématique locale (et mondiale)

Quoiqu’il en soit, c’est le démantèlement qui attend désormais le Grete Theresa. Un ultime chantier est prévu pour ce début d’année et nécessitera préalablement qu’un appel d’offre soit lancé pour sélectionner l’entreprise chargée des travaux. Ces derniers devraient revenir entièrement à la charge de la Stiles qui s’est vu communiquée une estimation chiffrée par le Port autonome : 13 millions de francs ! A noter que les squatteurs qui habitaient sur le navire ont été délogés en liaison avec l’association Accueil.

En Nouvelle-Calédonie, on ne compte pas moins d’un bateau pour dix habitants. Pourtant, les solutions pour traiter les navires en fin de vie sont rares (coucou Royal Recy Boat !). D’après une étude de l’Agence Française pour la Biodiversité (AFB), les bateaux de plus de 50 ans seront environ 20 000 en 2055, soit presque autant que le nombre de navires immatriculés aujourd’hui. Sans solution d’entretien adaptée, ces navires hors d’usage pourraient s’avérer particulièrement polluants.

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Développer et structurer une filière calédonienne

En métropole, la filière chargée de traiter ces bateaux en fin de vie se structure, et la startup de Franck Ollivier et Loïc Luciani compte bien tout mettre en œuvre pour combler le retard de la Calédonie dans ce domaine. Royal Recy Boat propose ainsi « de déconstruire les bateaux de plaisance hors d’usage (BPHU) et autres embarcations de manière respectueuse des critères sociaux et environnementaux en proposant un objectif de recyclage ou revalorisation à 100% ».  Quelque chose nous dit que l’idée à de l’avenir… et il va falloir mettre les mains dans le cambouis !

Grete Theresa
Traitement des navires hors d’usage dans les eaux calédoniennes par © Royal Recy Boat

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