Après avoir fait un petit tour sur son bolide ailé, il était grand temps de papoter « voiles et voiliers » avec Jérôme Aucan, le skipper d’Ho’okipa ; entre deux réunions, le navigateur s’est confié sur son parcours de vie, sa « love-story » avec son bateau, le « métier-passion » qu’il exerce aujourd’hui à la Communauté du Pacifique mais également sur quelques souvenirs de jeunesse. L’occasion pour la rédac’ de surfer sur la vague du kiffe avec un ce « franc camarade »…
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Bonjour Jérôme et bienvenu sur NeOcean ; après avoir partagé une petit nav’ sur Ho’okipa avec ton « crew », on s’est dit qu’on voulait en savoir plus sur son skipper : toi ! Est-ce que tu pourrais nous résumer ton parcours de vie en quelques dates clés ?
Salut NeOcean ! Et bien, je commencerais par un âge : à 16 ans, je deviens moniteur de voile aux Sables-d’Olonne ; d’abord « moniteur fédéral » avant de gravir les échelons et de m’arrêter au stade de « formateur de moniteurs » mais je n’ai jamais passé mon brevet d’État. L’idée, c’était de travailler comme saisonnier, gagner un peu d’argent, faire du surf et de la voile et fuir la grisaille du Perreux-sur-Marne, ma banlieue parisienne.
A 22 ans, j’ai emménagé à Hawaï dans le cadre de mon doctorat en « Physique des océans » ; moins de voile mais beaucoup, beaucoup, de surf ! Ensuite, en 2007, retour aux sources : je fais quelques régates sur d’autres bateaux et l’ambiance ne m’avait pas plu alors… j’ai acheté mon propre bateau, Ho’okipa !
Entre temps, j’avais suivi un parcours étudiant « maths sup’, maths spé’ », puis une école d’ingénieur qui formait à l’architecture navale, au génie maritime : je voulais construire des voiliers ! Dans cette école, j’ai finalement découvert l’océanographie, la « physique des océans », et j’ai poursuivi cette voie. C’est à cette époque que j’ai décidé certes, de ne plus construire de bateaux mais… de continuer à naviguer dessus !
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Peux-tu nous parler de ton histoire d’amour avec Ho’okipa, de ton rapport à la navigation et des émotions que te procure cette activité ? Un souvenir mémorable à partager ?
A Hawaï, je cherchais donc, malgré mon petit budget, à acheter un bateau et je suis tombé sur Ho’okipa, un voilier avec un beau palmarès qui appartenait, à cette époque, à un consortium de japonais – d’où les caractères encore présents sur la coque ! Le navire était skippé par un ancien champion olympique de 4’70 qui l’avait utilisé strictement pour la régate.
Pourtant, ça faisait quelques années que le bateau ne participait plus aux régates ; les jeux de voiles étaient un peu abîmés, l’intérieur était délaissé donc j’ai rénové le bateau intégralement avant de le rééquiper. Aujourd’hui, Ho’okipa dispose des caractéristiques de sa jeunesse avec quelques ajouts de confort : l’eau courante, un frigo, un lavabo et des toilettes fonctionnels, de la lumière, la radio… Bref, Ho’okipa est aujourd’hui un croiseur rapide, un savant mélange entre croisière et régate.
Mon plaisir en mer, c’est avant tout la glisse !
Brice de… Non : Jérôme de Nouméa !
La glisse du bateau sur l’eau, le réglage des voiles et, évidemment, la franche camaraderie qui règne à bord ! L’un de mes moments favoris, c’est quand le bateau est lancé au portant, sous spi, et qu’il surfe les vagues… Au-dessus de 10 nœuds, il commence à surfer et à 14 nœuds, à la barre, c’est un dériveur ! Dans le lagon, c’est juste incroyable de rester sur la vague avec ce voilier…
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On sait que ton activité professionnelle de scientifique est également liée à l’océan ; peux-tu nous en dire plus sur ton job et nous expliquer le rapport à l’océan du gamin du Perreux-sur-Marne, la ville où tu as grandi en région parisienne ?
J’ai toujours adoré les documentaires sur la nature et j’aimais bricoler ; du coup, pendant une grosse partie de ma carrière, j’ai combiné l’ingénierie et la science de l’océan en travaillant sur les systèmes d’observation. Comment comprendre l’océan ? En l’observant. Comment l’observer ? En y allant pour installer des mouillages, des bouées, immerger des outils de mesure au fond de l’eau… qui peuvent rouiller, qui peuvent se décrocher etc. Les problématiques liées à l’environnement marin sont si nombreuses… La partie matériau m’intéresse donc énormément.
Et puis, il y a la partie électronique également ! Des systèmes compliqués pour les différentes mesures : systèmes optiques, acoustiques, d’alimentation… et enfin, le travail d’automatisation des relevés et de leurs traitements. Bref, une foultitude de problématiques techniques, mécaniques, technologiques qui permettent de faire des découvertes scientifiques ! L’ingénierie, c’est partir de la théorie pour fabriquer un truc qui fonctionne. Les sciences de la vie, c’est l’inverse : il faut partir d’une situation naturelle pour essayer de comprendre comment elle fonctionne, d’en déchiffrer les mécanismes.
De la théorie à la pratique vs de la pratique à la théorie. Passionnant !
Jérôme, la passion dans le sang…
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