Jeudi dernier, l’Université de la Nouvelle-Calédonie a embarqué son public pour une odyssée scientifique à travers le Parc naturel de la mer de Corail (PNMC), à l’occasion de la Fête de la science 2025. Les différents intervenants présents ont chacun leur tour levé le voile sur les coulisses d’un ouvrage collectif exceptionnel : « Nouvelle-Calédonie : Un océan de savoirs – Une odyssée scientifique dans le parc naturel de la mer de Corail ».

Fruit de plus de 20 ans de recherches et du travail de plus de 60 auteurs, cet ouvrage publié aux Presses universitaires de la Nouvelle-Calédonie, en coédition avec l’IRD, et coordonné par Claude Payri, directrice de recherche à l’IRD, raconte une histoire où se mêlent sciences, cultures et enjeux de gouvernance. 

__

Un océan culturel 

“Nos mythes et légendes racontent la genèse du monde. Pour nous, l’océan est aussi le monde où habitent les esprits. Les grands fonds marins sont des lieux de repos des âmes.” – Jean-Yves Poedi

Dès les premières interventions, le ton était donné. L’océan n’est pas qu’un espace naturel, il est un espace culturel et spirituel. Jean-Yves Poedi, représentant du Sénat coutumier et co-auteur du premier chapitre, a rappelé la place centrale de la mer dans la vision du monde kanak. Dans la conception coutumière, l’océan est sacrégarde-mangerguérisseur et lien entre les êtres. Il relie les communautés, les territoires et les esprits. Cette approche, aujourd’hui reconnue au sein du comité de gestion du Parc, inspire une gouvernance plus partagée, où les savoirs coutumiers dialoguent avec la science. 

__

Un océan turbulent et vivant

Sous la surface calme du lagon, c’est un autre monde qui s’agite. Christophe Menkes, climatologue à l’IRD, a invité le public à “zoomer” sur la dynamique des eaux du Parc. Grâce aux technologies de pointe (planneurs sous-marins, bouées instrumentées, ROV), les chercheurs cartographient un univers tissé de tourbillons, de courants et de filaments, où la turbulence alimente la vie. Ce ballet invisible relie les écosystèmes, influence le climat régional et modèle la répartition de la biodiversité.

__

Les récifs sous pression

“Un tiers des récifs encore intacts du monde se trouvent ici, en Nouvelle-Calédonie.” – Fanny Houlbreque

Colorés, complexes, mais fragiles, les récifs du PNMC sont les gardiens de la biodiversité. Fanny Houlbreque, directrice de recherche à l’IRD, a rappelé combien ces forêts sous-marines sont à la fois fascinantes et menacées. Les missions scientifiques, telles que BLANCO ou TIC TAC, se succèdent pour évaluer leur santé face aux canicules marines et au changement climatique. Chaque expédition révèle de nouvelles espèces, mais aussi l’urgence d’agir. Ces recherches ont déjà permis de revoir les zones de protection, d’interdire la pêche dans certaines aires sensibles, et d’établir un suivi régulier de l’état de santé des récifs. Un travail essentiel pour préserver ces joyaux, témoins vivants de la résilience calédonienne.

__

Gouverner la mer 

La mer de Corail est immense, et sa protection, complexe. Pierre-Yves Le Meur, anthropologue à l’IRD, a levé le voile sur les défis de gouvernance d’un espace marin de 1,3 million de km², partagé entre normes locales, régionales et internationales. Entre réserves naturelles intégrales et inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO, la gestion du Parc repose sur une gouvernance à plusieurs échelles, où chaque acteur a sa part de responsabilité. L’enjeu est tout tracé, construire une protection inclusive, où les innovations sociales et juridiques permettent d’intégrer toutes les façons d’habiter et de concevoir l’océan.

océan
Comment gérer la gestion du Parc ? © NeOcean

__

Un océan de savoirs

De la science aux coutumes, le Parc naturel de la mer de Corail se révèle comme un terrain d’exploration et de coopération unique au monde. À travers cet ouvrage « Nouvelle-Calédonie : Un Océan de savoirs », les chercheurs, coutumiers et gestionnaires nous rappellent une évidence souvent oubliée : protéger la mer, c’est aussi protéger ce que nous sommes. Et si l’odyssée de la mer de Corail nous apprend une chose, c’est qu’entre science et culture, le dialogue reste le plus bel outil de navigation.

__